Diabète et troubles digestifs (« syndrome de l’intestin irritable »)

Près de 75% des personnes ayant un diabète (de tout type) expériences des troubles digestifs, principalement des sensations de « trop plein » accompagnées parfois de nausées, des ballonnements, des douleurs abdominales et des troubles du transit (Bytzer et al., 2001; Maisey, 2016).

Les femmes sont les plus touchées (Maisey, 2016).

 

diabète et troubles digestifs

 

Les causes des troubles digestifs en cas de diabète

Ces symptômes sont principalement liés à une atteinte nerveuse.

Notre système nerveux central (le cerveau) et le système nerveux entérique (celui du tube digestif), communiquent en permanence. Ces 2 systèmes nerveux peuvent être touchés par le diabète. La perturbation de leur échange d’informations affecte la motilité intestinale induisant une gastroparésie (Krishnan et al., 2013) et/ou augmente la sensibilité viscérale.

 

Les troubles digestifs peuvent également être liés à une a augmentation de la perméabilité intestinale précédant l’apparition des troubles digestifs et, mise en cause dans l’apparition du diabète 1 et 2 (De Kort et al., 2011).

L’hyperperméabilité intestinale (HPI) induit des réactions immunitaires avec une production importante de cytotoxines (molécules du système immunitaire) accompagnée de dommages des cellules bêta du pancréas (responsables de la sécrétion d’insuline), favorisant l’insulino-résistance (De Kort et al., 2011).

 

Le microbiote intestinal est altéré chez les personnes diabétiques. On note notamment une diminution des Bactéroidetes et une augmentation des Firmicutes notamment chez les personnes atteintes de DT2. L’alimentation est principalement responsable de ces modifications. La qualité des graisses joue un rôle majeur (Wu et al., 2015).

le microbiote chez les diabétiques est perturbé pouvant mener à des troubles digestifs
Frome Franks, 2012

 

 

Le diabète s’accompagne de perturbations des sécrétions hormonales dans le tube digestif ce qui contribue aux troubles de la motricité et de l’absorption (El-Salhy, 2002).

Pour finir, une mauvaise gestion de la glycémie (qui est d’ailleurs favorisée par une gastroparésie, un vrai cercle vicieux), affecte la motricité intestinale. De plus, l’hyperglycémie induit un stress oxydatif et une apoptose (mort des cellules), aggravant les troubles moteurs et sensitifs digestifs (Frøkjær et al., 2007).

 

 

le diabète peut induire des troubles digestifs par perturbation de la glycémie

 

En bref

Les troubles digestifs expérimentés chez les diabétiques sont liés à :

    • une atteinte nerveuse
    • une HPI
    • un microbiote déséquilibré (dysbiose)
    • une perturbation des sécrétions hormonales
    • des hyper et hypoglycémies

 

Les troubles digestifs les plus fréquents en cas de diabète

Gastroparésie

La gastroparésie est un ralentissement des mouvements de l’estomac, induisant une augmentation du temps passé des aliments dans l’estomac, d’où une sensation de trop plein, d’avoir trop mangé malgré de petites quantités (satiété précoce) et de nausées. Un ballonnement sous le nombril gênant peut être ressenti, et ces symptômes peuvent perturber le sommeil.

On estime que 27 à 65% des personnes ayant un diabète de type 1 (DT1) et 30% des personnes ayant de type 2 (DT2), sont touchés par un ralentissement de la vidange gastrique (Maisey, 2016; Rayner et al., 2001).

De plus, le surpoids touchant 80 à 90% des personnes diabétiques de type 2 (Nianogo & Arah, 2022) est un facteur aggravant la gastroparésie.

Le diagnostic de la gastroparésie est essentiellement basé sur les symptômes et l’exclusion de pathologies pouvant avoir les mêmes symptômes (Parkman et al., 2004).

La gastroparésie peut être induite par certains médicaments tels que la metformine, ou comme mentionnée plus haut, par des hyperglycémies répétées (Maisey, 2016; Rayner et al., 2001). Une à 2 personnes sur 10 sous metformine est touchée par des troubles digestifs (Maisey, 2016).

Les hyperglycémies font accentuer la gastroparésie et induire un stress oxydatif, aggravant les troubles digestifs.

 

Comment résoudre la gastroparésie

Le « traitement » de la gastroparésie inclus (Maisey, 2016; Parkman et al., 2004) :

    • Corriger des déficits nutritionnels
    • Veiller à une hydratation adéquate (quantité et timing)
    • Stopper tabac et alcool
    • Réduire la quantité des aliments ingérés à chaque repas en apportant des aliments à haute densité nutritionnelle
    • Limiter les graisses cuites et les aliments très riches en fibres insolubles
    • Contrôler de la glycémie
    • Réévaluer le traitement médicamenteux
    • Utiliser un prokinétique

 

Diarrhées

Une diarrhée chronique survient chez 3 à 22 % des diabétiques (Lysy et al., 1999).

Les diarrhées peuvent être liés à une atteinte nerveuse

Le SIBO résultant d’une baisse de la motilité intestinale est retrouvé chez 40% des diabétiques souffrants de diarrhées (Maisey, 2016).

Les hyperglycémies affectant les sphincters. L’hyperglycémie inhibe le sphincter anal externe, ce qui peut mener à des incontinences (Russo et al., 2004).

La diarrhée peut aussi être un effet secondaire des traitements médicamenteux.

 

Constipation

L’entéropathie diabétique peut également se manifester par de la constipation, affectant 60% des personnes diabétiques (Phillips et al., 2006)

Reflux

Le reflux est principalement lié à une relaxation du sphincter de l’œsophage situé entre l’œsophage et l’estomac (Dent et al., 1988). Parce que ce sphincter est sous contrôle de nerf, la neuropathie liée au diabète peut réduire le tonus et la contraction de ce sphincter, menant au reflux.

Les reflux toucheraient jusqu’à 41% des personnes diabétiques de type 2 (Wang et al., 2008). Le surpoids est un facteur de risque indéniable.

 

 

En résumé

Les personnes diabétiques sont à risque de développer des troubles digestifs liés. Il est essentiel d’exclure la présence de pathologies telles qu’une selon les symptômes (insuffisance pancréatique, maladie cœliaque), et réévaluer le traitement médicamenteux (Maisey, 2016).

Ensuite, la prise en charge des troubles digestifs repose sur des règles hygiéno-diététiques, la correction de déficits nutritionnels, la mise en place d’un protocole en cas de SIBO, et l’usage de prokinétique.

Réguler la glycémie est primordial.

Il faudra « chouchouter » le microbiote intestinal en nourrissant les bactéries via des fibres (attention au type) afin qu’elles produisent du butyrate (acide gras à chaine courte lié à l’amélioration de la résistance à l’insuline (Wu et al., 2015).

 

***

 

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Bibliographie

Bytzer, P., Talley, N. J., Leemon, M., Young, L. J., Jones, M. P., & Horowitz, M. (2001). Prevalence of gastrointestinal symptoms associated with diabetes mellitus: a population-based survey of 15 000 adults. Archives of internal medicine, 161(16), 1989-1996.

De Kort, S., Keszthelyi, D., & Masclee, A. (2011). Leaky gut and diabetes mellitus: what is the link? Obesity Reviews, 12(6), 449-458.

Dent, J., Holloway, R., Toouli, J., & Dodds, W. (1988). Mechanisms of lower oesophageal sphincter incompetence in patients with symptomatic gastrooesophageal reflux. Gut, 29(8), 1020-1028.

El-Salhy, M. (2002). The possible role of the gut neuroendocrine system in diabetes gastroenteropathy. Histology and histopathology.

Frøkjær, J. B., Andersen, S. D., Ejskjær, N., Funch-Jensen, P., Arendt-Nielsen, L., Gregersen, H., & Drewes, A. M. (2007). Gut sensations in diabetic autonomic neuropathy. Pain, 131(3), 320-329.

Krishnan, B., Babu, S., Walker, J., Walker, A. B., & Pappachan, J. M. (2013). Gastrointestinal complications of diabetes mellitus. World journal of diabetes, 4(3), 51.

Lysy, J., Israeli, E., & Goldin, E. (1999). The prevalence of chronic diarrhea among diabetic patients. The American journal of gastroenterology, 94(8), 2165-2170.

Maisey, A. (2016). A practical approach to gastrointestinal complications of diabetes. Diabetes Therapy, 7(3), 379-386.

Nianogo, R. A., & Arah, O. A. (2022). Forecasting obesity and type 2 diabetes incidence and burden: the ViLA-obesity simulation model. Frontiers in Public Health, 10, 818816.

Parkman, H. P., Hasler, W. L., & Fisher, R. S. (2004). American Gastroenterological Association technical review on the diagnosis and treatment of gastroparesis. Gastroenterology, 127(5), 1592-1622.

Phillips, L. K., Rayner, C. K., Jones, K. L., & Horowitz, M. (2006). An update on autonomic neuropathy affecting the gastrointestinal tract. Current diabetes reports, 6(6), 417-423.

Rayner, C. K., Samsom, M., Jones, K. L., & Horowitz, M. (2001). Relationships of upper gastrointestinal motor and sensory function with glycemic control. Diabetes care, 24(2), 371-381.

Russo, A., Botten, R., Kong, M. F., Chapman, I., Fraser, R., Horowitz, M., & Sun, W. M. (2004). Effects of acute hyperglycaemia on anorectal motor and sensory function in diabetes mellitus. Diabetic Medicine, 21(2), 176-182.

Wang, X., Pitchumoni, C., Chandrarana, K., & Shah, N. (2008). Increased prevalence of symptoms of gastroesophageal reflux diseases in type 2 diabetics with neuropathy. World journal of gastroenterology: WJG, 14(5), 709.

Wu, H., Tremaroli, V., & Bäckhed, F. (2015). Linking microbiota to human diseases: a systems biology perspective. Trends in Endocrinology & Metabolism, 26(12), 758-770.

 

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